Nouvelle étoile montante de la trompette, ce jeune Américain d’origine nigériane au parcours impeccable (de la Berkeley High School au premier prix du concours Thelonious Monk 2007) se distingue bien au-delà de ses références académiques. Inspiré et humble, son ambition est d’aboutir à la création d’un univers personnel « au service de la beauté » (sic). Né et élevé à Oakland, Californie, c’est en tant que membre du Berkeley High School Jazz Ensemble qu’Akinmusire attire d’abord l’attention du saxophoniste Steve Coleman. Le New-yorkais lui propose de rejoindre son groupe, Five Elements, et de partir en tournée européenne.
Ambrose Akinmusire a tout juste dix neuf ans. Bientôt de retour sur la côte ouest, le jeune trompettiste s’inscrit au Thelonious Monk Institute de Los Angeles : “ Je me suis retrouvé là en face de professeurs nommés Herbie Hancock, Wayne Shorter ou Terence Blanchard. J’ai beaucoup appris au contact de Terence ”.

L’année 2007 est décisive dans la carrière d’Akinmusire : il remporte la Thelonious Monk International Jazz Competition,puis la Carmine Caruso International Jazz Trumpet Solo Competition et, pour finir l’année, publie enfin son premier album pour le label Fresh Sound New Talent (Prelude… To Cora). Il s’installe à New York et se produit avec Vijay Iyer, Aaron Parks, Esperanza Spalding ou Jason Moran. Avec ce dernier, il participe notamment à la création du projet multimédia In My Mind : Monk At Town Hall, 1959. Son deuxième album, When the heart emerges glistening, parait en avril 2011 chez Blue Note : une bombe ! Akinmusire est là pour durer…

Pour rendre hommage à son idole Thelonious Monk, le pianiste Jason Moran a conçu un événement original dans l’histoire du jazz. Son projet multimédia est en effet plus qu’un simple « tribute to ». Lorsque le San Francisco Jazz Festival lui a suggéré de recréer le célèbre concert du Thelonious Monk Orchestra à Town Hall de 1959, Moran s’est d’abord plongé dans les archives du photographe W. Eugene Smith.

Le célèbre photo-journaliste américain (disparu en 1978) a en effet côtoyé les plus grands musiciens de jazz des 50’s dans son loft de Manhattan transformé en studio de répétition et d’enregistrement, et c’est chez lui que Monk préparera son concert de Town Hall. Moran a notamment découvert là des bandes contenant de longues conversations entre Monk, d’habitude plutôt taciturne et taiseux, et son arrangeur Hall Overton. Avec l’aide de Glenn Ligon et David Dempewolf, le pianiste texan a donc mis en scène ces images rares, cette voix étrange, pour enrichir une relecture inventive de sa musique. Dans son album Artist In Residence de 2006, Jason Moran avait déjà employé ce procédé sonore avec la voix d’Adrian Piper.
Mieux qu’une recréation du concert de 59 où Monk était pour la première fois entouré d’un grand orchestre, Moran et le vidéaste Dempewolf nous racontent une histoire. Ils mêlent pour cela les images fixes ou animées, la musique d’un octet rutilant et des sons d’archives inouïes jusqu’alors. Dempewolf a également tourné dans l’appartement new-yorkais de Moran, ainsi que sur la plantation de Rocky Mount (Caroline du Nord) où les grandsparents de Monk étaient esclaves. C’est là que Thelonious Monk vécu les cinq premières années de sa vie.